Huile Sur Bois

Gilbert pastore (1932-2015), Tourtour, huile sur panneau


Gilbert pastore (1932-2015), Tourtour, huile sur panneau
Gilbert pastore (1932-2015), Tourtour, huile sur panneau
Gilbert pastore (1932-2015), Tourtour, huile sur panneau
Gilbert pastore (1932-2015), Tourtour, huile sur panneau
Gilbert pastore (1932-2015), Tourtour, huile sur panneau

Gilbert pastore (1932-2015), Tourtour, huile sur panneau  Gilbert pastore (1932-2015), Tourtour, huile sur panneau
Je suis né le 15 mars 1932 à Marseille. Je vis alors avec mes parents dans le « Roucas », rue de la Martinique. 1935 - Mon père, menuisier-ébéniste, décède et ma mère se retrouve seule avec moi. Trinité (c'est son prénom) décide alors de faire des chapeaux et devient modiste.. 1938 - À la veille de la guerre, je suis recueilli par mes grands-parents maternels à Mane (Haute Provence). Malgré la guerre, cette période reste à jamais gravée dans ma mémoire comme des souvenirs heureux. Là-bas, je vais à l'école, je fais des cabanes dans les arbres, j'ai plein de copains et je fais des kilomètres à vélo... Je dessine sur tous les bouts de papier, en marge de mes cahiers. On m'offre une boîte de peinture et je commence à peindre tout ce que je vois, que je découvre. 1944 - Ma mère revient me chercher pour Marseille, c'est une sorte de déchirement de quitter cette tendre grand- mère. Je retourne à l'école (mais en pension), celle de l'abbé Fouques. J'apprends peu ou très peu, on m'humilie, me punit. J'ai beaucoup de mal avec cette instruction violente. 1946 - Inscription aux Beaux-Arts de Marseille ainsi qu'à un apprentissage au métier d'artisan-ébéniste. Je fais également plein de petits boulots pour gagner quelques sous pour la maison : étalagiste, peintre en lettres, des panneaux publicitaires.. 1948/1949 - Aux vacances, je remonte à Mane avec une joie immense. C'est là que je rencontre l'artiste Boris Bojnev pour la première fois. C'est un « Monsieur »!

Je lui montre mes dessins, mes petites peintures ; il m'encourage, me soutient et m'apprend beaucoup de choses. Ainsi, il me laisse collaborer à son travail et intervenir dans son ouvre. Il m'accorde le droit de modifier ou transformer le caractère de certaines de ses peintures « naïves » qu'il encadre ensuite avec des matériaux récupérés, fragments de bois, chiffons, papiers, faïences, etc. Enfin, il me donne confiance en moi et le goût de lire, surtout la poésie qu'il affectionnait et introduisait dans ses peintures. Gilbert Pastor à 16 ans à Mane.

1952 - Ma mère, qui s'était remariée entre-temps (et était à nouveau veuve), rencontre à son tour Bojnev et en tombe follement amoureuse. L'année du service militaire à Salon-de-Provence : dix-huit mois de souffrance! Le décès de ma grand-mère, un immense chagrin. 1954 - Retour à Marseille ; je continue à collaborer avec Bojnev, mais surtout je fais tous les petits boulots qui se présentent.

1956 - Algérie, retour sous les drapeaux... Parti pour six mois, resté un an! Trinité va voir le commandant de l'armée de terre et lui dit : « Si mon fils meurt, je tue de Gaulle »! 1958/1968 - Pour gagner quatre sous, je retourne comme peintre en lettres aux « Vins Kiravi » le vin qui ravit... Reprise des cours du soir aux Beaux-Arts avec des « modèles vivants ». Je sens que je m'améliore dans le dessin. Après les cours, je continue à peindre dans ma chambre, mais l'espace me manque. Pas ou très peu d'amis véritables à Marseille. Nouveau petit boulot : je peins dans la journée toutes sortes d'objets en bois, des quilles, des chevaux.. Durant ces années, je rencontre Louis Pons furtivement chez moi où il était venu avec Suzanne Valabrègue pour laquelle ma mère avait retouché des vêtements.

Nous ne pouvons pas dire que nous sommes devenus « amis » (nous nous sommes revus maintes fois), mais j'ai une grande admiration pour son travail. 1969 - Décès de Bojnev.

Trinité (que Boris appelait « Chips ») est désespérée d'amour. Elle ne veut plus rester à Marseille et souhaite monter à Aups dans le Var, chez une voisine de sa connaissance. Nous « campons » l'été à Aups et redescendons l'hiver à Marseille. Pendant ces mois de vacances, je vais souvent à Forcalquier retrouver les amis : Lucien Henry, Pierre Magnan, Olivier Baussan... Lulu (Lucien Henry) est sur son projet de musée Bojnev ; je lui donne toutes les toiles que j'ai de lui.

1973 - À l'occasion d'une rétrospective Bojnev au Musée de Flayosc, je rencontre Nicolas Valabrègue, âgé d'une vingtaine d'années ; il me fait connaître ses frères : Frédéric, José... Nous formons une joyeuse bande! Chips décide d'habiter Aups à l'année! Je fais les allées et venues en car pour Marseille.. Marseille où, malgré l'espace restreint, je travaille le soir à ma passion.

Les peintures réalisées à cette époque sont presque toutes offertes aux gens de mon entourage. C'est à cette période que je peins celle que Bernard Noël appellera « La Joconde ». D'autres tableaux, des reliquaires, « La Rue close », encadrée de cartons, « L'Accouchement », les ambiances coquines de rues, de villes, de bordels.. Mes soirées, mes nuits sont fort occupées!

1975 - Lucien Henry me donne l'argent nécessaire pour l'achat de la maison d'Aups, rue Rosette Cioffi, et je quitte définitivement l'appartement de Marseille. Dans cette étroite maison, j'installe mon atelier au troisième étage, sous les toits. L'espace, même s'il n'est pas très grand, me paraît immense! Je ne tarde pas à l'envahir... Je me fabrique un vrai chevalet et organise la « mise en scène » avec la maquette, le petit lit et le miroir.

Je peins du soir au matin. Je ne pense qu'à ça! Un ami de Nicolas vient un jour à l'atelier, accompagné de Paul Gauzit ; il s'intéresse beaucoup à mon travail.

Tout va alors très vite. 1977 - Première exposition au Lutrin, chez Gauzit, à Lyon.

Mon rêve se réalise enfin. 1980/1988 - Par l'intermédiaire de Frédéric Valabrègue, j'expose à La Touriale et à La Villa R. Voyages en Espagne, en Italie avec lui et son frère José, c'est formidable!

On dort dans des gîtes, on mange dans des bars à tapas et on boit des coups! Grand choc à Tolède à la maison du Greco, au musée du Prado à Madrid en voyant tous les Goya et les Zurbarán. Au retour, le train s'arrêta dans une gare où il y avait la fête du vin... Grenade, les jardins de l'Alhambra..

Dans la même période, voyage en voiture avec Nicolas et Marjolaine pour la Hollande. Merveilleux paysages de la France que je découvre. Amsterdam, là aussi, le choc, les Rembrandt...

Les musées Van-Gogh et Frans-Hals... Magnifiques collections, un souvenir inoubliable. Puis ces rencontres avec Christian Guez, Jean-Pierre Sintive que je connais à Draguignan lors d'une exposition de groupe. Nous sympathisons et lors d'une deuxième visite à mon atelier, Jean-Pierre me propose d'illustrer L'Approche, un livre de Pierre-Albert Jourdan pour ses Éditions Unes. Puis, il me fait rencontrer Bernard Noël et Jean-Louis Giovannoni avec qui je réaliserai une dizaine d'ouvrages communs.

Je suis très heureux et flatté de participer à ces livres et surtout de rencontrer leurs auteurs, écrivains et poètes que j'admire, qui sont devenus des amis. Dans ces temps-là, je rencontre le peintre Armand Avril dans un car... Nous faisons connaissance, il me fait rire (encore et toujours), je suis épaté, car il est plus drôle, plus déluré, moins timide que moi, son audace me laisse pantois!

J'aime autant l'homme que l'ouvre qui, à mon avis, est une des plus pures dans la création contemporaine. 1989 - Après des heures et des heures de conduite, je décroche enfin mon permis de conduire à 57 ans, et du premier coup! Je vais enfin pouvoir me déplacer à ma guise, aller voir les amis de Cotignac sans ne plus rien demander à personne et surtout promener ma mère. Je descends dans le premier garage de Draguignan et achète une 206 Peugeot. Trinité est ravie, je la promène, on s'arrête, elle s'endort dans son relax, je peins mes premières aquarelles, mes premiers paysages.

La même année, Yves Peyré me fait rencontrer Odile Serfati, responsable de la galerie Philip à Paris. Elle vient me voir à l'atelier, mon travail lui plaît et une exposition suit peu de temps après. Très professionnelle, elle agrandit le cercle des amateurs de mon travail à la région parisienne.

Parallèlement, j'expose à nouveau au Lutrin à Lyon et je travaille beaucoup. 1991 - Nouvelle et belle rencontre avec Micheline Ollier qui vient également à l'atelier et m'achète des dessins pour me décider à exposer dans sa galerie Berlioz à Sausset-les-Pins. Une grande amitié se noue avec cette personne sensible et passionnée d'art. Elle me révélera dans tout le périmètre marseillais. 1993 - Ma mère commence à vieillir, mais je ne veux guère l'admettre...

Elle décline, s'affaiblit et sa dégradation me rend triste. Elle me quitte définitivement en mai 1993.

1996 - Je rencontre Yveline Gatau lors d'un vernissage à la galerie Atys à Aups. J'aime immédiatement son naturel, sa spontanéité, sa joie de vivre alors que je traverse une période de vie assez sinistre..

Déménagement pour une autre maison à Aups et Yveline m'encourage dans les aménagements. Je ne me sens plus seul, elle me redonne confiance dans l'avenir, que nous partagerons bientôt ensemble.. Dans ce nouveau lieu, j'essaye de refaire mon atelier de la rue Rosette Cioffi, d'y retrouver ma lumière coutumière, mes habitudes et mon bordel en quelque sorte... À présent, je m'y sens bien, j'y ai retrouvé mon intériorité, c'est mon lieu, mon espace vital.

Une nouvelle galerie vient de s'ouvrir à Trans-en-Provence avec Stéphanie Ferrat et Jean-Pierre Sintive. De belles expositions accompagnées de lectures : un mélange artistique et poétique. J'y ferai deux expositions et un nouveau livre avec Jean-Louis Giovannoni. La fermeture de cette galerie, en 2010 suite aux inondations varoises, m'affectera beaucoup.

Dans l'été, Béatrice Soulié nous rend visite ; c'est une femme très dynamique et d'une grande générosité de cour. Dans sa galerie parisienne, elle avait exposé Pons, Avril, il ne manquait plus que moi pour faire le troisième! La galerie Philip ayant fermé, j'y expose quelque temps après avec succès. 2007 - Micheline Ollier cesse la galerie Berlioz et me fait alors rencontrer Michael Hall, qui lui en ouvre une à Aix-en- Provence...

2012 - Le 15 mars, j'ai eu 80 ans et encore plein de projets en tête. Il faut dire qu'Yveline déborde d'imagination! L'an dernier : New York, merveilleux! Je ne me sens pas vieillir, je peins, je dessine, je suis heureux.


Gilbert pastore (1932-2015), Tourtour, huile sur panneau  Gilbert pastore (1932-2015), Tourtour, huile sur panneau